Yo-Yo Ma: en classe avec le maître
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C’est en partenariat avec l’Orchestre symphonique de Montréal et la société Pro Musica, que l’Université de Montréal nous présentait en toute gratuité le célébrissime violoncelliste Yo-Yo Ma.
À quelques mois de la soixantaine, Ma n’en fait guère plus de 40, comme il l’a démontré lundi lors d’un cours de maître donné à la salle Claude-Champagne, et ce pour le grand plaisir des 800 personnes qui s’y étaient amassées.
Le cours débute avec un duo violoncelle-piano, Noémie Raymond-Friset et Michel-Alexandre Broekaert, respectivement. Tous deux ont choisi de livrer le concerto pour violoncelle n° 1 de Saint-Saëns. La pièce est longue, près de 20 minutes, et surtout notoirement difficile, mais les deux interprètes s’en tirent très bien, et offrent une belle performance. Celle-ci est chaudement applaudie. Dans un français rappelant distinctement celui de Nagano, Yo-Yo Ma propose aux membres du duo un exercice surprenant. Il remplit à ras bord deux verres d’eau, et dit que ces verres contiennent un poison. Si une goutte de ce liquide venait à toucher le sol, tout le monde dans la salle serait tué. Il se place à l’autre bout de la scène avec une carafe, et annonce que les deux interprètes ont 60 secondes pour prendre les verres et remettre l’eau dans le pichet. « On your mark… Go! » Pendant cette minute, tout le public maintient les yeux rivés sur les interprètes avançant à touts petits pas vers la carafe, jusqu’à ce qu’il transvase le « dangereux liquide ». La musique classique, explique Ma, est analogue à cette sensation de tension. Tout le monde (sans oublier les interprètes) sait que la pièce jouée est difficile et craint d’entendre une fausse note ou un accrochage. Pourtant, il faut donner l’illusion que c’est facile, et faire croire à cette illusion au public. Ce qui compte, c’est de ne pas laisser tomber le public, ou le verre dangereusement rempli d’eau dans ce cas-ci. Éventuellement, lorsqu’un interprète joue, ce qui compte n’est pas tant son propre plaisir que ce qu’il dit et fait ressentir au public.
On fait les choses pour que ce soit mémorable!
Nous serons marqués par son charisme indéniable, l’aura exceptionnelle qu’il dégage, par sa modestie sincère, sa grande générosité, sa pédagogie, son talent de vulgarisation pour les membres non musiciens du public (dans une faculté de musique universitaire, faut le faire!), mais surtout une résonance de ce qui me paraît être une caractéristique tout à fait juste de ce qu’est être un musicien : un don entier de sa personne.
Publié le mardi 18 mars 2014 par Pierre-Luc Senécal.